Saleilles, village du Roussillon
Nous savons que Saleilles était en 1292 la limite nord de la devèse, réserve de chasse royale des rois de Majorque, délimité par Perpignan, Pollestres, Villeneuve de la Raho et Saleilles. L’ordonnance précise que personne ne devra, dans cette surface, être trouvé porteur d’engins de chasse, ni de « balesta », piège de fortune fabriqué par les braconniers. Nous trouvons au sud de Saleilles, la forêt du Bercol principalement composé de chênes rouvres et d’oliviers dont les premières mentions datent de 883. Elle englobait Corneilla et existait encore il y a peu de temps. C’est bien avant le XVIIe siècle que commença le défrichement de la forêt qui la fit disparaître. Au XVIIIe, une autorisation royale était nécessaire pour prélever du bois car sa surface avait beaucoup diminué et était réduite au bois d’arbres de plus de 200 ans. Nous trouvons en 1776 une délibération accordant 12 chênes de cette forêt, à l’église Saint Jean de Perpignan, pour placer dans le clocher que l’on bâtit, la charpente des cloches. Le dernier arbre fut enlevé au siècle dernier. Nous avons du mal à imaginer que les terres arides et caillouteuses que nous connaissons, étaient plantées d’arbres dont une bonne partie avait plus de 200 ans d’âge. Autour de cette forêt, des vignes étaient plantées. En octobre 1305, une ordonnance précise que personne n’a le droit de vendre la vendange de Bajoles, Casteyl Rosseylo, Salelles, Cabestany et Vilanova, autre part que sur la place où il est coutume de la vendre entre « la casa d’en R. Gavela entro el canto d’en Morrut Sabater » (actuellement place de la Loge à Perpignan appelée à l’époque place des hommes riches : « Plassa dels richs homes »), sous peine de perdre la vendange. En recevra les un tiers, celui qui dénoncera les fraudeurs. C’est sous Pons du Vernet que le Vernet au nord de Perpignan devient un village ; ses terres et peut-être quelques propriétés à Saleilles seront vendues par son fils Jaubert de Castelnou en 1330 à l’Infant Ferdinand de Majorque.
Le 1er novembre 1322, le roi Sanche érige la baronnie de Canet en vicomté, en remerciement de la fidélité de Guillaume IV de Canet (acte de 1322 du roi sanche), et il rattache à la nouvelle vicomté les châteaux et lieux de Saint Nazaire, d’Alénya, de Saleilles etc…. Dans tous ces lieux, il permet à Guillaume IV de Canet d’avoir des baillis, des archers, des juges et autres officiers qu’il lui plaira, et autorise même ces hommes à dresser des » fourches » de bois pour les exécutions. Les fourches étaient deux poteaux plantés dans le sol sur lesquels reposait une poutre où étaient pendus les malfaiteurs. C’est sûrement à partir de 1322 que Saleilles aura un maire, agent du roi chargé des fonctions administratives et judiciaires ; après le XIIe siècle, ils deviennent des officiers sédentaires et leurs pouvoirs s’amenuisent à partir du XVe (archives de 1405, 1427, 1630,.1744. Saleilles aura aussi un prévôt : officier de gendarmerie (archives de 1293, 1354, 1367, 1372, 1385…) dont Arnaud de Serralonga en avait le titre de 1263 à 1293 ainsi que De Bernard en 1372.
Du milieu du XIVe jusqu’au XVIIe siècle qui fut la période faste de Saleilles, était aussi la période des esclaves. L’esclavage n’était pas reconnu en France depuis 1020, mais nous étions sous le règne majorquin. Chacun pouvait avoir son esclave qui pouvait valoir environ quatre veaux. L’évêque d’Elne en disposait lui-même de huit. On devenait esclave de naissance, en tant que prisonnier de guerre ou en punition de certains crimes ; gens de maison, ils étaient aussi très employés en agriculture. Le 19 août 1405 nous trouvons un acte stipulant que les hommes de Saleilles trouvent difficilement à se marier, et qu’ils ne peuvent vendre les dépendances de leurs bordes qu’en bloc, (ce qui rend les échanges difficiles) ; cet acte affranchit ces gens qui pourront à l’avenir acheter et vendre comme bon leur semble. La peste sévira en 1427, suivie d’un important séisme à Prats de mollo, en 1428, d’intensité 11 degrés (épicentre) et qui dura plusieurs jours en faisant de nombreuses victimes. En 1450, une secousse sismique moins violente, d’intensité de 8 degrés mais avec l’épicente à Perpignan reveillera les saleillencs. Les deux fois, à Saleilles et aux alentours, il y eut une grande panique mais pas de victimes, ni de gros dégâts. Une sentence arbitrale de 1442, condamne un fermier de la dîme de Bages et Salelles à s’acquitter de ses obligations envers la communauté. Le procureur royal concède aux gens de Saleilles, par un contrat en date du 6 mai 1443, le droit de faire un ruisseau pour alimenter des abreuvoirs et pour usages domestiques. En 1475 la famine touchera durement le village. Le 14 décembre 1507, mandement de Louis d’Oms ou il est question des biens tenus pour le chapitre de Saleilles. En 1581 Jean de Malpas est recteur de Saint Etienne de Saleilles.
Après une brève incursion française en 1457, nous resterons sous la domination espagnole, comme nous l’avons vu précédemment, jusqu’en 1463, date à partir de laquelle nous passerons à nouveau aux mains des Français pour un court épisode. En effet, la Catalogne s’était soulevée à la fin de ce XVe siècle et Jean II demanda à Louis XI un secours qui n’arriva jamais. Le Roussillon fut rendu à l’Espagne par le traité de Barcelone en septembre 1493 signé par Charles VIII. Louis XII en 1503, puis Louis XIII vint en personne faire le siège de Perpignan et Saleilles fut occupé par les armées françaises d’octobre 1641 à septembre 1642. Le siége fut éprouvant pour les perpignanais ; Pere Pasqual écrit en novembre qu’il n’a eu pour diner qu’un tête d’ail, en décembre il n’y a plus ni chien ni chat et les rats se font rares, pour noël, sa famille a partagé en trois un hareng et que ce fut un destin. Il raconte qu’en janvier ils ont commencé à manger le cuir des semelles de souliers, les parchemins mis à tremper. En février ils mangaient l’herbe du cimetière. Peu à peu la population quittait perpignan dont le siège dura jusqu’au 9 septembre. Le traité des Pyrénées, en 1659, mettra un terme aux guerres et nous serons définitivement rattachés à la France. Mais ce n’est qu’en 1700 qu’une volonté d’inclure définitivement notre région à l’état français apparaît. A cette date, tous les actes publics ont obligation d’être rédigé en français, ce qui a pour effet immédiat de changer l’orthographe des noms propres ; toutefois le catalan subsiste dans notre région et conserve toute sa vitalité. C’est à cette période que, pour être francisé, Salelles prend le i, afin de conserver la phonétique. Les noms propres, comme le nom de notre commune, ont fluctué au gré du temps (divers noms de Saleilles). Cependant aux alentours de 1800, après la Révolution, l’homme de la rue et le paysan parlent toujours le catalan, un catalan dépouillé d’hispanisme, accessible aux gallicismes. Les étrangers s’étonnent que la langue française ait fait si peu de chemin après un siècle et plus d’occupation. A la tribune de la Convention à Paris le 18 février 1794, Barrère clame : « Nous vous proposons de faire disparaître ces traces de barbarie et d’envoyer des instituteurs à ces citoyens qui ne savent pas encore parler le langage de la liberté ». La francisation est très lente, car au début du XXe le catalan est encore très présent grâce à la proximité de la catalogne espagnole et les nombreux siècles de vie commune qu’un trait sur une carte ne pourront effacer facilement. Par ces multiples écrits, la langue catalane est chargée de respect, de gloire et d’honneur. Elle a été utilisée pour des règlements appliqués par la majorité des pays européens.
Actuellement dans notre école nous apprenons l’histoire de France qui a eu très peu d’importance pour Saleilles. En effet, les gaulois n’ont pratiquement pas dépassé Château-Roussillon et notre village était sous l’influence des ibères. De 874 à 1462 nous étions catalans à part entière avec nos us et coutumes dans un royaume indépendant. Par exemple, tous les saleillencs se souviennent d’avoir étudié la guerre de cent ans qui eut lieu entre les Français et les Anglais. Cette guerre n’a pas concerné les saleillencs et nos rois de Majorques ont écrit les plus belles pages de notre histoire. Les rois de France et d’Espagne auraient bien fait de s’inspirer. Nous ne faisons officiellement parti de la France que depuis 1659, nous considérant jusqu’à ce siècle ni français ni espagnols. L’histoire que l’on nous a enseignée n’est pas celle que nos ancêtres ont vécu ! c’est pourquoi les noms des Comtes Rois de l’an 814 à l’an 1462 dont la liste vous est donnée dans la chronologie de nos différents gouvernements risquent de surprendre ceux qui seront confrontés pour la première fois à ces personnages qui ont « réellement écrit » une partie de l’histoire de notre village. La lente évolution de la formation de notre ethnie, la quête pour son indépendance, de la reconquête carolingienne à la plénitude de la couronne catalano-aragonaise, en passant par la fastueuse époque comtale ou par la brillante cour des rois de Majorca, ont fait des catalans un peuple original, ni meilleur ni pire que les autres, mais avec ses propres valeurs, ses propres institutions, ses propres problèmes.
Après le traité des Pyrénées, quatre ducs de Noailles de père en fils, qui vivaient à Paris, dirigèrent en tant que Gouverneurs Militaires de la province du Roussillon jusqu’en 1750. De 1750 à 1789, les Lieutenants Généraux se sont succédé. Le seul qui ait laissé un nom est le Comte de Mailly. Depuis Paris, ils ont gouverné par l’intermédiaire de 18 intendants. Le 13 juillet 1744 nous trouvons un contrat de parcerie ou de gazaille (concerne les troupeaux et s’apparente à ce que sont, pour les terres, les contrats de métayage) entre jean Lignères de Perpignan et Guillaume Négre pagés et maire du lieu de Saleilles. Jean Liguère apporte 7 vaches, Guillaume Négre les nourrit et les abrite. Quatre ans plus tard ils se partageront le troupeau et ses fruits. Moyennant dédommagement, Guillauma Négre pourra faire travailler 4 des vaches qui lui sont confiées. En juillet 1769, abolition du droit de parcours en Roussillon. Les paysans Saleillencs ont l’autorisation de clôturer leur champ. Les troupeaux saccagent tout en traversant les vignes ou les champs : « Les vendanges ne sont pas finies que déjà les bergers font entrer dans les vignes les bêtes qui dévorent les feuilles et les branches tendres, même les jeunes plants, ce qui met en péril l’avenir » se plaignait un agriculteur de chez nous.
Le 20 janvier 1790, la province du Roussillon devient par l’assemblé Constituante mis en place à la Révolution Française, le département des Pyrénées Orientales, avec des préfets et sous-préfets sans remettre en cause une unité ancienne. il sera créé 25 cantons et 256 communes : Cabestany et Saleilles sont fusionnées. A partir du 17 avril 1793 les Espagnols franchissent la frontière pour essayer de renverser la République en Roussillon et s’installent à Elne, Argelés et Corneilla del Vercol avec leur quartier général à Trouillas. La guerre est aux portes de Saleilles. Le quatrième bataillon de volontaires des Pyrénées Orientales, formé des volontaires des communes de Saint Nazaire, Cabestany, Alénya, Canet et Saleilles, est encerclé en juillet 1793 dans Collioure. Une guillotine est installée place de la Loge pour les « mauvais citoyens » qui auraient entretenu des relations avec les Espagnols qui sont repoussés définitivement chez eux le 18 septembre 1794.
La toponymie roussillonnaise a évolué en cinq étapes (toponymie des noms). Nos plus lointains ancêtres ont donné des noms aux lieux qu’ils habitaient, et quelques-uns de ces noms ont pu se perpétuer jusqu’à nous, plus ou moins altérés par les populations successives de la préhistoire et de la protohistoire : c’est l’étape de la substruction, ou prélatine. En apportant à notre pays, pendant les premiers siècles de l’ère chrétienne, la stabilité ethnique et l’unité linguistique, la romanisation cristallisera le substrat primitif et renouvellera le lexique des noms de lieux sur l’assise solide du latin triomphant. Ce sera l’étape de la fondation, ou latine. La troisième fût celle de la formation, ou romane, marquée par le Haut-moyen-âge, surtout à l’époque des Francs Carolingiens et pendant la féodalité, qui constituera l’essentiel de la toponymie et assurera la pérennité des termes par leur mention dans les documents écrits. L’étape de la stabilisation, ou catalane : après le XIe siècle, quand les langues nationales se dégageront des dialectes romans, le Catalan donnera aux toponymies du Roussillon leur personnalité particulière. Le rattachement de ce coin de Catalogne à la France, au XVIIe siècle, provoquera insensiblement une certaine francisation de notre toponymie, c’est l’étape de la décatalanisation, ou étape française, qui est toujours en cours. En effet, dès 1660 les colléges s’efforcent de faire progresser la francisation (interdiction de concours) et en 1700 un édit impose l’usage du français dans tous les actes publiés (interdiction du catalan). Après la guerre de 1940, les instituteurs punissaient encore les enfants coupables d’utiliser le catalan (voir le texte sur l’école de Saleilles)
Les seigneurs de Saleilles
Nous trouvons la trace de la seigneurie de Saleilles en 1058. En effet, c’est à cette date que Bérenger IV donnera le village au chapitre d’Elne avec le titre de la seigneurie de Saleilles. Désormais l’évêché est le Seigneur de Saleilles ainsi que le Seigneur des eaux et le restera jusqu’à l’abolition des seigneuries. Par contre nous trouvons à partir du Traité des Pyrénées de nombreux seigneurs de Saleilles. A part quelques propriétaires de terres dans notre commune et habitant Perpignan qui se sont proclamés “Seigneurs de Saleilles”, deux autres seigneuries apparaissent dans la région : la famille Mora-cata de Saleilles devenu en 1749, Marquis de Llo, de l’autre côté de la frontière, ou plus près de nous la famille Massia de Saleilles. Ceux-ci sont issus de la seigneurie de Salèles qui ont vécu longtemps à Perpignan et de nombreux membres ont siégé au Conseil Souverain du Roussillon. Leur nom a été souvent catalanisé, le “lle” se prononçant ille, ce qui prêta souvent à confusion dans les écrits. Nous allons vous présenter les principaux Massia de Saleilles qui, bien qu’étrangers à notre village jusqu’à preuve du contraire, se retrouvent dans beaucoup de documents de Perpignan entre 1660 et 1790 :
Guillaume III MASSIA , chevalier, seigneur de Saleilles, Président à mortier de 1693 à 1701 (Président à mortier : Président magistrat de la cour de cassation). Il fut également nommé garde des sceaux de la chancellerie du conseil souverain le 12 juillet 1695 et Grand Archidiaconé du diocèse d’Elne de 1708 à 1750. 2 B 38 fol 61, 72.
Guillaume IV MASSIA , chevalier, seigneur de Saleilles siégea au Conseil Souverain du Roussillon. Il mourut en fonctions. Le conseiller Guillaume de Saleilles fut un magistrat assez mondain. Les réceptions qu’il organisait autour de tables de jeux ne furent pas approuvées par la Cour qui jugea les jeux de hasard incompatibles avec la dignité de la magistrature. 2 B 38 fol 82, 2 B 84 fol 59
François Joseph Guillaume MASSIA , chevalier, marquis de Saleilles, fils du précédent, substitut du procureur général vers 1730, conseiller de 1737 à 1773. Ancien juge au baillage de Perpignan puis substitut du procureur général, il fut nommé conseiller le 5 janvier 1737. En octobre 1751, Louis XV érigea la terre de Saleilles (Salèles d’Aude) en marquisat, en faveur de François de Saleilles et ses descendants. Il se montra hostile à l’ordre des jésuites et eût un rôle déterminant dans leur expulsion du Roussillon. Ses théories sont exposées dans son « compte rendu de l’institut et des constitutions des soi disant Jésuites » imprimé à Perpignan en 1762. Il mourut au début de l’année 1774 et fut inhumé le 3 janvier à la cathédrale Saint Jean. François-Joseph de Saleilles qui n’eut qu’une fille, était le beau père du conseiller Hercule Joseph Bonet. 2 B 50 fol 180, c 12 et 2 B 38 fol 151, 2 B 48 fol 217
Le 12 septembre 1775, une reconnaissance de dette est consentie par Hercule Joseph de Bonnet « Seigneur de Saleilles » bien que ce soit sa femme qui possède le titre.
La dernière archive mentionnant une seigneurie de Saleilles que nous ayons trouvée, est écrite par M. Jaume : « Dés le commencement de 1790, plusieurs honnêtes gens se réunirent dans la maison de M. de Bonnet, ci-devant Marquis de Saleilles, conseiller au Conseil souverain, sise vis-à-vis de la place d’Armes, aujourd’hui Hôtel du Petit-Paris, pour faire le bien et tâcher d’entretenir la paix avec la ville. Mais c’est ce qui leur attira aussi la rage et la persécution des méchants. La nuit du 5 décembre 1791, ils furent assiégés dans cette maison par la populace qui s’était rassemblée sur la place d’Armes et aux environs ; trois ou quatre se sauvèrent en montant sur le toit et se précipitant dans les maisons ou rue de derrière ; tous les autres furent arrêtés, maltraités à coups de sabres ou de baïonnettes, et conduits à la citadelle ». Hercule Bonet et la “Demoiselle” de Saleilles n’eurent qu’une fille Amélie.
Illustrations
1 – Concession et inféodation faite par le roi Sanche en 1322 ↑
Concession et inféodation faite par le roi Sanche, comte de Roussillon et de la Cerdagne, Seigneur de Montpellier au noble Seigneur Don Guillaume IV de Canet entre autres châteaux et lieux, du Roussillon, du village et du château d’Alénya reçus en pouvoir de Bernard Vilanova, notaire le 14 juillet de l’année 1322.
Cet exemplaire ou transcrit, a été bien et fidèlement copié dans la ville de Perpignan, Diocèse d’Elne, d’un autre acte publié de concessions extrait du registre original des fiefs, lettre B, signé, gardé dans les archives du patrimoine du Comté du Roussillon, écrit sur papier approuvé, collationné et signé, ni rayé, ni suspect en aucune de ses parties, mais nul de tout vice et suspicion dont la teneur suit ainsi :
Qu’il soit connu de tous, que, nous Sanche par la grâce de Dieu, Roi de Majorque et C. ayant tout récemment donné et concédé en fief d’après la bonne coutume de Barcelone au Noble Guillaume de Canet notre aimé Sénéchal, et aux siens à perpétuité le mer et mixte empire, toute la haute juridiction, et toutes les justices appartenant au mer et mixte empire que nous avons et que nous devions avoir de quelque manière que se soit dans les villages Châteaux et lieux de villalongue, de Villarnaud supérieur (d’amont) et Villarnaud inférieur (d’avall), d’Alénya, de Saleilles et de St Nazaire dans le comté du Roussillon sus dit, et en leurs territoires, et districts quelconques ; laquelle collation et concession nous faisons au dit Noble au nom et à raison d’une permutation ou échange faits entre nous, et le même Noble des sus dits mers et mixtes empires des dits lieux alors nous appartenant, et du mer et mixte empire du Château de Saint Hippolyte et ses territoires alors appartenant au dit Noble à raison et à cause de l’achat qu’il avait fait du même mer mixte empire, comme nous l’avions autrefois donné en fief à feu Arnaud Travery, chevalier et docteur en lois ; de plus ayant donné et concédé au même Noble plein et libre pouvoir de créer et établir dans les sus dits lieux un notaire et des notaires publics, et publiés, et d’y avoir leurs baillis, juges, arbalétriers, et autres officiers selon sa volonté, de dresser et tenir dans les sus dits lieux des fourches patibulaires en bois ou en pierre ou d’autre manière comme il lui plaira, de les détruire, de les changer en un autre lieu dans les territoires des mêmes lieux selon sa volonté, comme de toutes ci, il conte pleinement et longuement dans un écrit public reçu et soussigné par notre fidèle notaire Jacques Escuder et scellé de notre sceau de plomb.
Finalement le dit noble Guillaume de Canet à raison prétexte de la dite permutation ou échange et de l’autorité et pouvoir sus dits par nous à lui concédés dans le château de Salelles, fit dresser des fourches patibulaires, et faire une proclamation publique en son propre nom ; dont, le vénérable Evêque et le Chapitre d’Elne dirent et assurèrent, qu’eux et leur Eglise se trouvaient très lésés et aggraves, c’est pourquoi ils nous envoyèrent leurs procurations, qui de leur part nous supplièrent humblement, de faire détruire les dites fourches et révoquer le un dite proclamation par droit de justice, mais quoique nous ne croyons pas qu’il vienne des sus dites choses aucun préjudice ni à l’Evêque ni au chapitre, ni à leur Eglise, et comme cependant nous ne voulons pas qu’à cause ou à raison de la dite permission le noble sus mentionné ait avec personne quelques sujets de litige, ou qu’à cause de cela il ait à subir ni dispute ni contestation avec qui que ce soit, comme nous voulons dans la dite permutation pouvoir à l’indemnité et utilisé, pour cela de la volonté et consentement du dit noble nous voulons et reprendre le dit mer empire du sus dit lieu de Saleilles, et nous révoquons sous cette manière et forme que nous l’avions au temps de la sus dite permutation.
Voulant cependant indemniser de cette partie le sus dit Guillaume comme nous y sommes tenus, en récompense et dédommagement du mer et mixte empire et de la haute juridiction que nous lui avons donné, comme il nous appartenait, dans le sus dit Château et territoires de Saleilles.
livre de Cagarriga n° 117 – Recueil des Capitols sous le n° 34
2 – Les divers noms de Saleilles rencontrés dans les archives ↑
SALELLAS (844 / 881 / 899 / 927 / 1058)
SALELAS (889 / 1058 / 1070 / 1071 / 1139 / 1181 / 1229)
SALELES (1100 / 1128 / 1292 / 1358 / 1305 / 1751)
SALELLIS (1327 / 1364 / 1408 / 1410 / 1541 / 1635)
SALELLES (1359 / 1628 / 1442 / 1490 / 1580 / 1660 / 1726 / 1745 / 1757 / 1774 / 1775 / 1782 / 1833)
SALLELLES (1395 / 1639)
SALELLAS (1578 / 1632)
SALLELES (1693 / 1780 / 1790 / 1845)
SALEILES (1792)
SALEILLES (de 1700 à nos jours, avec quelques fautes qui apparaissent sur des cartes françaises et notées dans ce tableau).
3 – Chronologie des différents gouvernements, autorités de tutelle de Saleilles. ↑
Préhistoire Peuple Pyrénéen
-500 à -400 les Ibères
-400 à -300 les Sordes
-300 à -154 les Celtes
-154 à 408 Empire romain / Dirigeant de Rome
408 à 414 les Barbares / Alains, Vandales, Suéves
414 à 712 les Wisigoths
712 à 793 invasions Arabes / Pépin le bref
793 à 814 les Carolingiens / Charlemagne
814 à 840 Louis 1er, « le pieux »
840 à 874 Charles II, « le chauve »
874 à 897 Dynastie Barcelonaise Joffre I, « le poilu »
897 à 911 Joffre II ou Borrell I (continu l’oeuvre de son père. Il meurt sans héritier et c’est son frère qui prend la suite).
911 à 954 Sunyer I
954 à 992 Borrell II (Libére la catalogne de l’influence française et commence à insuffler au pays un esprit d’indépendance).
992 à 1018 Ramon Borrell III (Le premier à frapper une monnaie catalane).
1018 à 1035 Berenguer Ramon I, « le bossu » (Comte de grande équité et de justice. Initiateur de la fameuse Trêve de Dieu de Toulouge).
1035 à 1076 Ramon Berenguer I, « le vieux » (Promulgue les premiers écrits des usages de Barcelone).
1076 à 1082 Ramon Berenguer II, « tête d’étoupe » (Il gouverne avec deux de ses frères. Ces quatre ans de régne furent de perpétuelles querelles).
1082 à 1096 Berenguer Ramon II, « le fratricide » (Il fait assassiner son frère pour régner seul).
1096 à 1131 Ramon Berenguer III, « le grand » (Fils de « tête d’étoupe » il prend la succession de la Cerdagne par l’extinction de la dynastie en 1118).
1131 à 1162 1ère dynastie Aragonaise – Ramon Berenguer IV, « le saint » (En épousant Peronelle, ce comte de Barcelone va devenir l’héritier de la dynastie aragonaise).
1162 à 1196 Alphonse 1er, « le chaste » (Permier roi de Catalogne et d’Aragon. Il a une politique de grande expension vers Toulouse et la Provence – Il se bat contre le roi de France et mourra à Perpignan).
1196 à 1213 Pierre 1er, « le catholique » (Vaillant et généreux, mais mauvais administrateur. Il épouse Marie de Montpellier. Sa défaite à Muret marque la fin de l’expansion catalane vers le nord).
1213 à 1276 Jacques I, « le conquérant » (Partage son royaume entre ses deux fils Pierre II et Jacques II)
1276 à 1311 Période Majorquine / Jacques II, roi de Majorque (Il s’installe à Perpignan et eut le surnom du « bon roi Jacques ». Il subit les pressions très dures de son frére Pierre II).
1311 à 1324 Sanche ou Pierre II (Il se bat contre le roi de France qui meurt à Perpignan pendant la bataille du 5 octobre 1285. Il meurt à Formiguères sans héritier. Le pouvoir est repris par son neveu).
1324 à 1344 Jacques III « le juste » (Fils de Pierre II, il prend le suite de son frére. Ildécréte l’indivisibilité de la Catalogne qui est au maximum de son expension, en comptant le royome de Majorque.
Lutte toute sa vie contre Pierre III et meurt à la bataille de Llucmajor. Ce sera la fin des rois de Majorque et le Roussillon est repris par Pierre III)
1344 à 1387 2e domination Aragonaise / Pierre III, « le cérémonieux » (Il fut un monarque absolu pendant ses 53 ans de règne. Il reprend le controle du Roussillon en 1344 et fonde en 1350 l’Université de Perpignan).
1387 à 1396 Dynastie Catalane / Jean I, « le chasseur » (A un goût élevé du raffinement, de la musique et de la poésie. Il meurt dans un accident sans héritier).
1396 à 1410 Martin I, « l’humain » (Né à Perpignan en 1356, il est le frére de Jean 1er. Il pert son fils Martin « le jeune » en 1409 et ne s’en remettra pas).
1410 à 1412 Martin « le jeune » (Par sa mort il entraine l’extinction de la branche directe de la maison de Barcelone).
Jacques II d’Urgell (Comme il avait épousé une fille de Pierre III, la représentation de la dynastie lui revient. Mais par le Compromis de Casp en 1412, il offre sa succession à la dynastie Castillane par Ferdinand D’Anquerra).
1412 à 1416 Ferdinand I d’Anquerra, « le juste » (Aura un régne très court).
1416 à 1458 Dynastie Castillane / Alphonse V, « le magnanime » (Fut le premier à affronter la langue catalane).
1458 à 1479 Jean II « le grand » (Hypothéque le Roussillon et la Cerdagne à Louis XI roi de France. Il essayera de les récupérer le reste de sa vie).
1479 à 1516 Domination Espagnole / Ferdinand, « le catholique »
(Il épouse Isabelle de Castille et marque la fin de la nation catalane qui se retrouve intégrée à l’Espagne en 1493).
1516 à 1558 Charles I dit Charles Quint
1558 à 1598 Philippe II
1598 à 1621 Philippe III
1621 à 1641 Philippe IV
1641 à 1659 Territoire Français Louis XIII
1659 à 1750 Louis XIV avec les Gouverneurs militaires
1750 à 1789 Louis XV – Louis XVI avec les Lieutenants généraux
1789 à ce jour la République Française au travers des Préfets
4 – Toponymie des noms dans la région de Saleilles ↑
AGULLA DE LA MAR : canal creusé par les Templiers au XIIe siécle, pour assecher les étangs.
ALENYA : de Alanius, Alanyano (1270).
ANGLARS : (927) près de saleilles aujourd’hui disparu. Désigne des lieux écartés et pauvres.
ARGELES : Argelariam (981) désigne un sol argileux.
ARGELES-PLAGE : (récent) était le Racou qui signifie recoin.
BAGES : Bajas (928) dépression marécageuse de racine ibère : baje, époque pré-romaine.
BAJOLES : près de Cabestany ; même origine que Bages. Baiolas (1100),Stagnum de Bajolis (1211).
BOACA : Bœtius près de Théza, toponomie disparue devenu Mas Blanc.
BOURDIGOU : de bordigol, hutte de pêcheur.
CABESTANY : Caput stagnum de caput (tête) et stagno (de stagnum, étany, en catalan estany) Cap d’estany, promontoire ou tête de l’étang de Canet – Saint Nazaire. Cabestagnio (927) Capite Stangno (1211) et Capitestanyo (1342).
CANET : Caneto (XIe siécle) de can, canna, cannetum, en catalan canya : roseaux.
CANET-PLAGE : était « el port de Canet ».
CHATEAU ROUSSILLON : Castellum ou Castro rossilio (870), résidence comtale, ancien Ruscino.
COLOMINE ou couloumine : terre appartenant à deux seigneurs ou plusieurs propriétaires, propriété franche d’impôts pour la commune. Colomine de canet après le stade de Saleilles.
CORNEILLA DU VERCOL : anciennement Corneilla del bercol. De Cornelius, le second terme provient de l’ancienne forêt de Bercol qui a donné Vercol en français. A l’origine Berchale Silva (869), silva = forêt.
CROUETTES : petites croix de carrefour, bornage ou carrefour.
ELNE : d’Illibéris.
ESTANYS : du latin stagnu : eau stagnante, désigne des étangs. Nombreux sites dans le département, notament sur le littoral. Près de Saleilles : Els estanys.
GUARDIA : du germanique wardon, tour à signaux élevée à l’époque carolingienne : servaient de guet. Vuardia Maurescla (990) : vigie contre les maures et pour les transmissions.
LA TOUR-BAS-ELNE : anciennement Arziliaco, ancien nom de Aricilius.
LLAMBINNES (les) : filles de Mr Llambi, propriétaire à Saleilles qui ont données leur surnoms aux terres qu’elles se sont partagées.
MAILLOLES : jeune vigne, du latin malleolus. Malleolas (902).
MONTESCOT : Montescapri (930) de capra, chévre, aussi Montescabre. autre possibilité, la plus plausible : Roderado dans Rodrat (Roderadi, 930) devenu Montescot.
PERPIGNAN : Fundus Perpenius-anum =Perpiniano puis Perpinyà. La forme actuelle, nasalisée, est une fancisation du XVIIe siécle.
PLANES : petits terrains plats ou en terrasses. Las planes route d’alénya à la sortie de Saleilles.
POLL : peuplier.
POU de les COULOBRES : Chemin de Perpignan à Saleilles où ce trouvait un puits, rare point d’eau dans cette zone où pullulait les couleuvres .
PRIM : à Saleilles Terre prim désigne une terre de faible rapport.
REART : de Rio Arido (872), voir chapitre sur l’eau.
SAINT CYPRIEN : de villa Salix (915) ancien nom de Sallix alio nominé Santi Cipriani. En catalan San Cebria, du grec Cyprianus.
SAINT CYPRIEN-PLAGE : s’appelait « les Routes ».
SAINTE MARIE DE LA MER : Sancta Maria de Mari (1312)
SAINT NAZAIRE : cité en 899 avec son nom primitif Solsa, lieu planté de souches ou callemos en catalan. Plantes destinées à la teinturerie et à la table des pauvres. En catalan San Nazari.
SALEILLES : (844) du germanique saal désigne une salle : ici petite salle.
THEZA : de Tittius, Tezano (1211).
VERNET : près de Perpignan, vient de Vern en catalan aulne, époque pré-romaine.
VILLENEUVE DE LA RAHO : de Radon (814), Rado (854), Radoni (932) : nom du seigneur wisigoth qui fonda le village, et de villa, nom latin : propriété rurale ajouté du nom de la personne à la germanisation. Villa plus l’adjectif nova exprime une concession nouvelle attribuée au IXe siécle par les Comtes carolingiens.